Carlos Manuel de Céspedes: symbole de l'âme cubaine


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Dans la solitude de ses derniers jours à San Lorenzo, il a écrit la longue lettre à la ressemblance d'un journal, où il a conte à sa bien-aimée Ana de Quesada les rigueurs de son refuge isolé, l’ancien Président de la République en Armes étant convaincu qu’il ne lui restait que peu de temps à vivre.

Sa maison de guano, comme il l’a décrit, était faite de bons bois, elle avait deux chambres bordées de palmier et une table de cèdre où un hamac, un bureau, un banc, des armes et d'autres ustensiles... formaient l'univers auquel s’était réduit sa grandeur humaine. La nourriture ne manquait pas, ainsi que l'affection des voisins car « rare est le jour où nous ne recevons pas de visites » et la salle de bains était dans le ruisseau qui se jetait dans les eaux du Contramaestre.

À ce moment-là, l'amour filial le soutenait face à tout chagrin : « Je trouvais une certaine consolation en voyant vos portraits tous les jours. Je les montrais à presque tous les patriotes qui venaient me voir. La plupart d'entre eux, surtout les femmes, me demandent de les voir. Ils font un millier de gestes d'admiration et ils leur donnent un million de bénédictions, tous souhaitant que nous soyons ensemble de nouveau ». Carlos Manuel de Céspedes supplie seulement son Ana, en paiement à l'amour, l'altruisme et la fidélité maintenus dans la distance, uni au soin stoïque des jumeaux Gloria de los Dolores et Carlos Manuel, qu’elle croit combien il lui était extrêmement douloureux d'être séparé d’eux.

Certains grands hommes de l’Histoire ont affronté leur destin dans la solitude, enveloppé dans la marée des mesquineries humaines et des ambitions du pouvoir. Cependant, leur splendeur s'épanouit invariablement après la mort et se reproduit dans l'inspiration grandissante qu'ils représentent pour les patriotes à naître. Céspedes était l'un d'eux.

Il a compté sur l'héroïsme des cubains pour consommer l'indépendance et avec la vertu de ses compatriotes pour consolider la République quand, en 1869, il a été nommé Président. Il a promis à ses disciples, qui étaient nombreux, l'altruisme et avec sa propre vie il a donné la preuve de l'accomplissement de l'engagement acquis, dans le sacrifice et la renonciation au pouvoir et au bien-être matériel.

Les idéaux des hommes de 1868, comme on connaît la génération de créoles qui se leva en arme contre la domination espagnole, ont progressé dans la discrétion de la franc-maçonnerie. La Loge Buena Fe, dans le territoire de Manzanillo, regroupait des leaders de la palpitante Révolution un 26 juillet 1868 ; comme si cette date était prédestinée dans l'histoire de Cuba.

Sous la direction de Céspedes, le maître vénéré de cette loge, les idées qui unissaient les hommes visionnaires de la Guerre de Dix Ans se sont clarifiées. Il y avait alors « un catéchisme des connaissances de base, un système pédagogique, philosophique, politique pour l'éducation et la formation du peuple ». La pensée émancipatrice du maître José de la Luz y Caballero était ancrée dans la devise « Science et vertu. Science et conscience ». Il a été convenu de la nécessité de l'égalité sociale et les classes les plus démunies ont été désignées comme unique donné pour transformer le monde en un peuple de frères.

Et surtout, on concevait la patrie dans la plus pure tradition de la pensée révolutionnaire cubaine initié par Félix Varela : « La patrie est (...) le noyau social et culturel des traditions et des habitudes du peuple et, surtout, une source de justice sociale et de projection vers un avenir commun, juste et libre ».

Un cespediano avoué est sans aucun doute l'Historien de la Ville de La Havane, pour qui la fascination pour cet homme de l'indépendance nationale s’est réaffirmée quand il a eu dans ses mains, après une longue recherche, le livre et le petit livret recueillant les incidences quotidiennes de la vie de Céspedes du 25 juillet 1873 au jour de sa mort le 27 février 1874. La minuscule lettre qui présumait l’économie de l'espace, montrait cependant des caractères clairs et précis. Le lutteur infatigable avait dédié ses notes à sa bien-aimée Anita, qui a été privée de la jouissance consolante de la lecture des perceptions de son homme.

Pour Eusebio Leal, la grandeur de Céspedes réside dans sa condition humaine. Il était irascible et d’un géni orageux et parmi les sacrifices imposés par la Révolution, le plus douloureux - comme il l'a avoué par écrit - était son caractère. Cependant, cette nature volontaire et énergique l’a également conduit à l'audace de lancer l'indépendance.

Quand il est mort dans la géographie accidentée de San Lorenzo « (...) Beaucoup ont pleuré cet homme étrange qui a partagé avec quiconque ses quelques biens personnels, avec la même sérénité qu'une fois, étant le seigneur des vies et des haciendas, il avait opté pour la vocation infiniment supérieure de révolutionnaire ».

Tous les 10 octobre, avec la discipline et la dévotion de ceux qui reconnaissent la transcendance du legs cespediano, les Cubains de plusieurs générations se rassemblent au pied de la statue du Père de la Patrie, sur la Plaza de Armas, pour ensuite faire le pèlerinage vers la Salle des Drapeaux du Musée de la Ville. L'ancien Palais des Capitaines Généraux – symbole de l'irréversibilité de l'indépendance nationale – thésaurise aujourd'hui les plus importants étendards insignes mambises, parmi eux et dans un lieu d'honneur, celui qui a flotté dans la sucrerie La Demajagua ce jour 1868.

La cérémonie au cours de laquelle les notes originales de l'Hymne de Bayamo semblent revenir dans le temps, est devenue une tradition que l'Historien a instituée, accomplissant un autre des legs pleins de symbolisme, de son prédécesseur Emilio Roig de Leuchsenring.

Leal explique : « Lors de sa réouverture en 1968, le Musée de la Ville a ouvert ses portes pour célébrer le premier centenaire du 10 octobre. C'était un accord et une belle suggestion de notre bien-aimée et inoubliable amie et compañera Celia Sanchez qui avait pris de son père, le Dr Manuel Sánchez Silveira, cette profonde vocation envers Martí et Céspedes. Une commission nationale avait été créée pour la célébration du centenaire, présidée par le Commandant Faustino Perez, une autre grande personnalité dans l'histoire de la Révolution. Il m'a donné tout son soutien et nous avons travaillé très dur pour terminer la première partie du Musée de la Ville, qui n'incluait pas ce que quelques années plus tard serait la réalisation principale : la Salle des Drapeaux, l'endroit où nous allons en pèlerinage tous les 10 octobre après avoir rendu hommage à Céspedes au pied de la statue se trouvant au centre de la Plaza de Armas ».

Placer cette statue au centre de la Plaza de Armas a été l'une des grandes batailles de votre prédécesseur, Emilio Roig. Comment le premier Historien de La Havane a-t-il remporté ce combat ?

C’était paradoxal qu’il n’y avait aucun monument de Céspedes, le Père de la Patrie, à La Havane. Le seul qui lui avait été dédié avait été levé avec les efforts de deux maîtres : Hortensia Pichardo et son mari Fernando Portuondo.  Ils étaient professeurs de l'Institut de la Víbora, une institution en face de laquelle avait été dévoilé un modeste buste.

A partir de ce moment, a commencé une bataille ― une bataille d’Hortensia, de Fernando et logiquement du Dr. Roig ― pour faire sculpter une œuvre magnifique représentant Céspedes, comme l’a appelé un biographe, le Héros dandy, vêtu élégamment, comme le jour de sa mort, avec ses meilleurs atours, regardant vers l'avenir.

Ceci supposait d’enlever la statue du roi Fernando VII de la Plaza de Armas, une figure abominable de l'histoire, non seulement de la monarchie espagnole, mais de la politique internationale de l'époque, caractérisée par les relations complexes entre l'Espagne et la France, l'invasion de Napoléon en Espagne, et les trahisons successives de Fernando VII envers son père, le mouvement libéral, les soldats fidèles à la cause de l'indépendance nationale. Enfin, l'homme qui a réprimé avec une main si cruelle et dure tout les mouvements progressistes espagnols et américains de son temps.

Beaucoup de gens, certains intellectuels et historiens, n'ont pas soutenu l'acte du Dr. Roig. On conserve un registre des critiques qui lui ont faites quant au dilemme du monument historique à Fernando VII qui devait rester là. Roig se défend comme un chat et place le monument car il sait que le roi est resté au pouvoir dans la Cuba de ce moment, symboliquement, représenté par la tyrannie vicieuse, corrompue, décadente et criminelle. Lors de la décision de placer la statue de Céspedes, il l'a fait à la recherche d'un symbole propice à l'âme de Cuba.

Il place la statue, cependant, il ne détruit pas celle de Fernando VII et il décide de le garder dans le Musée.

Quand c’est présenté le dilemme au moment de la restauration de la Plaza de Armas - où les essences de la place originale ont été sauvegardées -, il était impossible, au nom de n'importe quel principe, de replacer celle de Fernando VII.  Peut-être, si le débat avait lieu aujourd'hui, la statue pourrait être là, parce que Céspedes appartenait à tous les cubains et méritait et mérite un grand monument.

Ce que j'ai répondu à Carlos Rafael Rodríguez quand il m'a posé des questions sur ce cas particulier, parce qu'il avait été témoin de ce débat qui a tant blessé Emilio Roig.  Nous avons de nouveau placé celle de Fernando VII à un angle de la place, avec la même plaque que le docteur Roig a écrit pour son exposition postérieure, et qui explique tout. Toute personne qui passe par la Plaza de Armas s'arrête pour la lire. C'est une leçon permanente que mon prédécesseur nous a donné, car il est préférable d'expliquer les monuments et l'histoire, et de ne pas le cacher.

Quelles étaient les conditions personnelles, les circonstances de la vie qui ont fait de Céspedes l'homme de la Révolution indépendantiste ? Pourquoi lui et pas un autre ?

Le rôle de l'homme dans l'histoire est seulement nié par les petites et mesquines fourmis pensantes. Céspedes a été le leader de ce mouvement et ce leadership il l'obtient, d'abord, pour ses antécédents.

Nous pensons qu'il était un homme de culture ; il parlait six langues. Dès l'âge de onze ans, il commença la tâche de traduire, par exemple, les chants de La Énéide du latin ; il a fait une excellente traduction. En tant qu'avocat, il avait étudié le latin, le grec, l'anglais, il parlait parfaitement le français et l’italien. Cela lui a permis, quand il a terminé ses études à Barcelone, avec un diplôme d’Avocat du Royaume, de faire un grand voyage qui l'a amené en Angleterre, en France, en Italie, en Turquie...

Récemment, il y a eu un événement très intéressant : l'apparition de la reproduction dans une gravure d'un petit cadre illustrant une réunion inhabituelle à Paris, où apparaissent Céspedes, la Avellaneda, la comtesse de Merlin...  Si cela est vrai, nous trouvons une figure qui, dans cet environnement, était très motivée par les idées les plus avancées de la pensée et de la cubanía.

Céspedes était un excellent cavalier, un bon escrimeur, un joueur d'échecs qui terminait parfois les parties de dos, pour sa connaissance de l’échiquier. C'était un orateur passionné. Quand on lui a permis d’exercer et de réaliser sa profession à Cuba, quand il est revenu à Bayamo en tant qu’avocat, il est devenu l'un des avocats les plus sollicités pour certaines causes.

Il faut rappeler qu'avant il avait fait ses études dans la capitale, dans le séminaire de San Carlos y San Ambrosio et dans l'Université de La Havane. Cela veut dire qu'il a été dans les deux espaces où la pensée cubaine a été débattue dans cette ville. Et chaque jour, sur son chemin depuis l'Université au Séminaire, ou du Séminaire à l'Université, il devait passer par le Liceo Artístico y Literario où le meilleur de l'intellectualité du pays se rencontrait.

Dès 1850 il apparaît comme un homme dangereux pour l'autorité espagnole, comme quelqu'un qui est assidu aux cercles culturels qui masquent un projet politique. Il souffre de nombreuses fois la prison : la prison de Manzanillo, expatrié de Baracoa dans le Morro de Santiago de Cuba, dans les chambres humides du navire Soberano, ancré dans le port de Santiago comme une relique de la bataille de Trafalgar.

Les loges maçonniques commencent à être fondées. La franc-maçonnerie était l'institution la plus progressive et la plus éprise de liberté de l'époque : le grand legs libéral - et je dirais presque romantique - de la maçonnerie qui, à cette époque à Cuba, aspire à une société sans esclaves. Céspedes l'exprime dans son poème autobiographique Contestación.

Il me manquait ce détail : il est aussi poète. Et nous devons voir comment la poésie et la littérature ont influencé le forgeage d'un sentiment national : Heredia, Avellaneda ; ceux qui entourent Céspedes, José Fornaris, Francisco Castillo, sont des poètes. Les trois seront les créateurs de La Bayamesa, qui a été chanté au pied de la fenêtre d'une très belle femme de Bayamo.

Céspedes avait une parenté familiale avec une autre personnalité très importante dans cette histoire, Pedro Figueredo, et avec un autre grand gentilhomme, Francisco Vicente Aguilera.

À cette époque est créée une loge très important appelée Buena Fe - cela précède le soulèvement - dans laquelle ont participé non seulement des cubains, mais aussi des espagnols libéraux qui aspiraient au changement et à la transformation de Cuba.

Il est très probable - c'est une question qui est discutée - que le soulèvement était fixé pour une date déterminée, mais il est reporté encore et encore à la recherche de circonstances propices. Enfin, il va y avoir un accord : si le complot est découvert - comme presque tous les complots - le premier à se lever sera secondé par les autres.

Le complot a été découvert et Céspedes a été le premier à se lever ?

C'est une hypothèse.

Est-il vrai qu'une date de grande importance pour la couronne espagnole pourrait aussi motiver le moment du soulèvement ?

Le 10 octobre a été le onomastique de la reine Isabel II et la fête officielle qui est célébrée depuis la Capitainerie Générale de La Havane jusqu’à la dernière possession du gouvernement dans le pays. Avant, lors d'une autre célébration qui avait été préparée à l'occasion de la naissance de la princesse des Asturies, Céspedes avait organisé un bal qui était considéré comme une attitude provocante envers l'autorité. Il a été accusé pour cela. Il y avait une cause commencée car un portrait de la reine Isabel II avait été emprunté pour cette circonstance, qui a eu le même sort de celui placé dans l'Université de La Havane : il a été déchiré.

Quelques heures avant le 10 octobre, le jour de l'anniversaire de la reine, un mouvement insurrectionnel a été détecté. Le gouverneur d’Oriente avait été prévenu par divers chefs politiques et militaires que les cloches, les éperons et les machettes se préparaient dans cette région. On a même dit que des armes avaient été achetées, qu’elles avaient été débarquées à un certain endroit : de nombreuses informations contradictoires se généraient.

En fait, il y avait très peu d’armes. Lors d’une conversation mémorable, il avait affirmé à son interlocuteur : « ce sont eux qui ont les armes », dans un appel pour les arracher à l'ennemi.

Enfin, à la veille du 10 octobre, le Capitainerie Générale a ordonné une arrestation de tous les éléments qui étaient censés être dans la conspiration. C’est pour cette raison que Céspedes a eu recours au 10 octobre.

Pour moi, c’est peut-être une merveilleuse coïncidence, ou quelque chose propre d'une personne aussi intelligente que lui qui, lors d’une réunion précédente dans un de ses endroits préférés, San Miguel del Rompe, il a affirmé que la puissance de l'Espagne était caduque et vermoulue car depuis des siècles on la regardait à genoux. « Levons-nous ! » a clamé Céspedes. Cela signifie que sa volonté est contre l'opinion des compagnons qui ont proposé qu'il était nécessaire d'attendre une nouvelle moisson pour pouvoir acheter armes et provisionnement. C'était peut-être une politique prudente, qui venait comme une recommandation de la part des conspirateurs de La Havane, qui ont promis leur soutien. C’étaient des groupes fondamentalement réformistes, qui avaient été effrayés par les actions conspiratives de Narciso Lopez en 1849, 1850 et 1851 et qui n’ont pas bougé un doigt pour le sauver ; ils ont participé aux conspirations mais l'ont finalement laissé seul.

Ils prenaient les armes pour la première fois en réalité et avec une vision d'indépendance et d'abolition de l'esclavage, contrairement à tous les mouvements précédents. Ce qui n’était pas clair en 1849, ni en 1850, ni en 1851, pour Céspedes ce l’était en 1868.

Sa lucidité se basait sur les qualités d'un homme de grande culture, jeune, bien qu'il ait 50 ans, était l'un des plus vieux parmi les chefs les plus importants qui se levaient en armes.

Immédiatement après le soulèvement de La Demajagua, d’autres ont commencé à éclore dans différents points de Manzanillo, de Jiguani et de toute cette zone orientale. Les gens se lèvent, venaient avec des armes et très rapidement la poudre a été allumée, recevant le nom de « El grito de Yara » (Le cri de Yara).

Pourquoi la révolution a-t-elle pris le nom Yara et non pas de La Demajagua ?

Hortensia Pichardo se le demandait et nous en avons parlé plusieurs fois. Céspedes lui-même l'a expliqué dans son dernier journal. Il a dit que tôt le matin en sortant de La Demajagua où se sont réunis ceux ayant répondus à son appel, ils se sont dirigés à Yara site où a eu lieu le premier affrontement avec les troupes espagnoles.

Il y a eu alors un échange de tirs, une confusion – on dit qu’il pleuvait - ; la vérité est que Céspedes est resté momentanément avec une poignée d’hommes – on dit qu’ils étaient douze - et avec le drapeau qui avait été brodé dans la sucrerie par Candelaria Acosta (Cambula). C'était un drapeau différent de celui conçu par Narciso López et Joaquín de Agüero (le drapeau qui les accompagnait dans les expéditions de 1849, 1850 et 1851).

Je ne sais pas pourquoi Céspedes a changé cette conception, alors que personne ne pouvait oublier ce drapeau. Plus tard, à Guáimaro, il sera convenu que le drapeau national sera celui de Lopez et d’Agüero. Cependant, afin de ne pas blesser l'Oriente et Céspedes, qui avait été le premier à se lever, le résultat de son dessin - qui est comme le drapeau de la République du Chili avec les couleurs inversées, a présidé les sessions de la Chambre et, postérieurement, celles du Congrès cubain.

En vertu de l'accord Nº 1 de l'Assemblée Nationale du Pouvoir Populaire, les deux drapeaux sont présents dans sa salle de réunion. Céspedes est aussi très présent chaque fois que nous chantons l'Hymne National. Le 20 octobre, après avoir pris la ville de Bayamo, Pedro Figueredo a dévoilé les lignes musicales qu'il avait composées, une sorte de synthèse de certaines mélodies qui étaient très importantes et même populaires.

Le maître Manuel Duchesne Morillas, le père de Manuel Duchesne Cuzán, m’a dit qu’ils avaient découvert certains antécédents dans l'hymne cubain. Il montrait une grande inspiration patriotique et il a été composé sans les paroles, pour accompagner la procession du Corpus Christi dans l'église de Bayamo. La Marseillaise française venait derrière furtivement ; un peu – a dit Duchesne - du Barbier de Séville et, finalement, dans la lutte, il est devenu ce qu'il est aujourd'hui : une grande marche révolutionnaire et l'Hymne National des cubains. Mais il n’avait pas de paroles.

Le 20 octobre, après que Céspedes intercède personnellement pour la capitulation de ceux qui ont été assiégés à Bayamo, naît la première capitale de la Révolution et la première mairie révolutionnaire, dans laquel Céspedes se soucie de proposer et d'intégrer pour la première fois des personnes qui n'étaient pas de race blanche et qui avaient été jusqu'à ce moment absolument discriminées.

N'oublions pas que le 10 octobre, dans son exploitation de La Demajagua, où les meilleures cannes à sucre étaient produites et où il avait réussi à refaire sa fortune détruite des années précédentes, il avait des ouvriers salariés ; c’est-à-dire qu’il était déjà passé à une forme supérieure de production ; la production esclavagiste cède le pas au capitalisme, qui était le plus révolutionnaire de l'époque et qui est venu à nous tardivement, en tant que société esclavagiste.

Céspedes a travaillé avec des ouvriers salariés ; mais il avait dans toutes ses exploitations, selon les données existantes, 53 esclaves qu'il avait acquis avec la propriété que la maison Venecia de La Havane lui avait étendue pour La Demajagua, qui était dans un endroit privilégié, en face du golfe de Guacanayabo avec la sierra.

Il n'y avait qu'une poignée d'esclaves dans l’exploitation, assez pour être libéré par Céspedes pour se convertir en un symbole de sa volonté : le mélange de la poudre était allumé.

Là se trouvaient les différentes plantations de Céspedes et d'autres familles qui étaient également dans la conspiration, comme celle de Francisco Maceo Osorio, la famille de Titá Valvar, celle de Jaime Santiesteban, tous ces noms apparaissent parmi ceux qui se sont levés ce jour.

Francisco Vicente Aguilera n’était pas là car il a appris la nouvelle à Cabaniguán, dans son latifundio, d’où il vient avec tous ses hommes, jetant au feu l'une des plus grandes fortunes de Cuba, après avoir mis tout en vente. Il était l'homme le plus riche parmi eux.

Il a été appelé Le Précurseur sans Gloire, car durant longtemps les historiens ont débattu sur des sujets purement personnels, et n'ont pas vu le processus social que la Révolution entraînait, ni la grande contribution aux idées politiques que le soulèvement armé supposait, ils se sont plutôt arrêtés sur les luttes personnelles que seule la marée de la Révolution a pu purifier dans le temps et a pu conquérir.

Dans le temps que nous vivons et grâce à l’œuvre au travail de Fidel Castro, l'unité a été rendue possible, le rêve plus chéri par cet homme qui a été capable de soulever en 1868 : Céspedes.

Il a été accusé de tout : de tyran, d'aristocrate, d'élitiste... Ce qu'ils ne peuvent pas lui enlever ses détracteurs – qu’il a eus et qu’il a encore - est précisément son caractère en tant que précurseur, sa capacité à se battre. Céspedes, comme Maceo, ne fumaient pas et ne buvaient pas ; on ne l’a jamais entendu dire une mauvaise phrase ou une offense. Il était fin et tranchant comme un couteau dans les arguments politiques et jamais vulgaire. C’est seulement dans les pages secrètes du journal qu'il est en mesure d'utiliser les termes les plus durs.

Certains historiens mentionnent qu'il y a eu un moment où il a sacrifié son rôle dans la Révolution pour cette unité nécessaire. Coïncidez-vous à cette vision ?

Il a été écarté quand la Chambre a cessé d'être représentée par les hommes illustres de Guáimaro et c’est de là que vient cette sorte d'idéalisme qu’a analysé Enrique José Varona dans une telle profondeur ; un idéalisme qui, parfois, ne cessant pas d'être pur et d'avoir des aspirations nobles, s'écartait de la réalité.

La réalité était - et Céspedes l’a dit - que chaque discours et chaque réunion constituaient un temps perdu, que ce qui devait être fait était de se battre pour triompher. C'est sa vision. Il était aussi très idéaliste.

Céspedes est la personne qui, à Guáimaro – il ne pouvait pas être autrement - a été élu Président de la République constituée. Mais au nom de l'idéalisme qui craint la tyrannie -comme Martí lui-même le définira -, la crainte de César ou des généraux d'Alexandre, le conduit à subordonner le pouvoir exécutif au législatif ; je veux dire, le Président à la Chambre.

Cela s’explique car Céspedes n'était pas seulement le Président ; il était le leader de la Révolution et n'avait pas besoin de titre ou de charge pour être ; il l’était ! Mais, cependant, il cède.

Il y a ceux qui ont vu une lutte générationnelle en ce moment politique. Comme nous l'avons dit, Céspedes assiste à ces actes quand il a déjà 50 ans. C'est embarrassant d'avoir vécu un peu plus et de penser au temps qu'il doit vivre. Et dans ces discussions, il cède ; il donne le drapeau car c'était le drapeau avec lequel il a pris les armes, pour une idée qui est dans son manifeste : « Cuba veut être un peuple libre et indépendant pour tendre la main à tous les peuples du monde ».

Mais en plus, c’est un acte incroyable – qui est comme jeter du feu sur poudre - de libérer ses esclaves. La vingtaine qui était dans La Demajagua.

Il y a la présence d'un homme très important, José Joaquín Palma, ami et premier biographe de Céspedes ; une biographie que le propre Céspedes a corrigé, dans laquelle il dit qu'une Cuba libre ne pourra plus jamais être esclave ou avoir des esclaves. C'est le concept, plus que la lettre.

Ensuite, il n’y a aucun doute que le critère démocratique de cet idéalisme doctrinal, parfois un peu délirant et séparé de la réalité, s’impose à Guáimaro.

Combien aurait pu influencer ce contraste ayant existé entre Céspedes et Agramonte dont certains se réfèrent ?

Il a toujours été traité par ceux qui ont jeté de l’huile dans le feu de la lutte, pour opposer Céspedes à Agramonte. Et ce n'est pas vrai. Les deux venaient de souches similaires. Quand vous allez à Camagüey, la maison d’Agramonte est la plus importante de la ville, de deux étages, un palais ; une maison patricienne en face de l'église de La Merced. Mais la maison qui est conservée de Céspedes est également une grande demeure à Bayamo. Laquelle était sa résidence et son cabinet d'avocats, celle des colonnes et du péristyle, qu’il a brûlé irrévocablement.

Les deux ont beaucoup à perdre et ils le sacrifient tout pour l'idée. C'est la première chose. Les deux ont étudié dans des espaces similaires : dans l'Université Royale et Pontificale de La Havane, avec toute sa portée culturelle, y compris le Séminaire, où ils ont assisté aux cours, aux causeries et où ils ont écouté des intellectuels qui offraient des conférences érudites dans l’ancien siège de l'Université.

C'est précisément dans cette Université - à ce moment-là une université laïque – qu’ils vont entendre les voix qui vont être si importantes pour les deux.

Céspedes a ensuite étudié à Barcelone ; Agramonte aussi, où était la partie la plus économiquement avancée de l'Espagne de cette époque et où il y avait un grand mouvement d’autonomie et d’indépendance. Le drapeau catalan va inspirer beaucoup le drapeau de l'étoile solitaire.

Les deux étaient avocats. Dans un pays comme Cuba, les deux professions déterminant dans son histoire ont été celles du droit et de la médecine. Céspedes, avocat ; Agramonte, avocat ; Martí, avocat ; Fidel, avocat.

Il y a eu un choc. C'était inévitable. Il existait. Il y a même eu un moment où Céspedes décide - je crois, avec un sentiment de gratitude – d’aider la famille d’Agramonte, et il demande qu’on lui donne une pension quand il était devenu orphelin et Agramonte répond à cela...

La même chose s'est produite autour de Céspedes : il y avait toujours des coryphées, des courtisans, qui aiment allumer la bougie, et il est possible qu’ils l’allumaient, de sorte qu'il s’est produit quelque chose d'inhabituel : un défi au duel d’Agramonte à Céspedes, ce qui était terrible car Céspedes était Président de la République ; la demande d'un duel au Président de la part d’un Major Général de l'Armée n'était pas seulement inconstitutionnelle, mais c’était aussi un acte de rébellion.

Comment Céspedes traite-t-il cela ? Avec un sens de son expérience vécue, il comprend le sentiment blessé d’Agramonte ! Et comment il le résout ? Comment agit-il quand Agramonte renonce à son commandement, un commandement pour lequel il était si doué ? Agramonte est comme Sucre de cette histoire ; l'homme le plus préparé après Céspedes, car il avait les quatre qualités : la connaissance culturelle, la connaissance du Droit, l'aspiration à l'État de droit et le culte pour la liberté. Il était plus jeune, il est mort à l'âge de 31 ans.

Agramonte était extraordinairement éloquent. Il devient un chef militaire capable de faire des choses extraordinaires, comme dans la bataille du Cocal del Olimpo, comme le sauvetage de Julio Sanguily, un acte de grande audace. Mais en plus, c'était un homme très respecté, un grand organisateur. Il avait organisé la guerre dans la province de Camagüey, dans les usines, les préfectures pour approvisionner l'armée...

À cette époque la région a encore un rôle décisif, et très peu ont réussi à surmonter la vision d'aller au-delà. C'est pourquoi quand, au retour d’Agramonte, Céspedes le nomme de chef de Camagüey et de Las Villas, quand il le désigne, premièrement, le passé est réparé ; deuxièmement, il prend la direction de la Révolution à Camagüey, où l'ennemi avait semé des ravages et des persécutions sans limites, il avait transformé la ville en un quartier général de ses troupes, et les familles cubaines et connexes comme la sienne étaient persécutées et humiliées.

Le plus grand de toutes les humiliations a été d'apporter son cadavre à Camagüey et de le brûler sur la Plaza de San Juan de Dios ; c’est la dernière chose que l’on pouvait faire là-bas, et l’on s’en souvient encore. En désignant Agramonte pour Camagüey, Céspedes remet une pièce dans le jeu d’échec.

La mort d’Agramonte est la mort de Céspedes, car il le précède. Si Agramonte avait été en vie, je pense que Céspedes n'aurait pas pu être destitué, comme cela a été. Bijagual n'aurait pas existé, qui est l'endroit géographique où a eu lieu la destitution de la part de la Chambre. Cet endroit est effacé de la carte aujourd'hui. Il est couvert par un barrage qui porte le nom du Père de la Patrie. C'était comme les eaux du Jourdain.

C'étaient des jours très amers. Et la destruction de la Révolution qui avait été en mesure de libérer les classes populaires a commencé, car son grand mérite a été de libérer non seulement les esclaves, mais aussi les classes populaires.

Et cela signifiait le retard de la Révolution définitive.

C'est un retard, car c'est une question de temps. L'Espagne aurait pu recourir à une quantité de ressources pour étouffer la Révolution, mais elle n'a pas pu, pour une situation interne, rassembler tout ce qui était nécessaire. C'est pourquoi la question du temps a été décisive.

Céspedes explique sa vision à Máximo Gómez qui - bien qu’il ne soit pas toujours d’accord avec lui - n'hésite pas à reconnaître que c'est ce caudillo qui a semé l'idée que sans une invasion de l'Occident, sans passer la frontière qui avait été établie dans le centre de l'île, même si un million d'hommes étaient placés dans l’orient du pays, Cuba ne serait pas libre.

Qu’elle a été la stratégie de lutte conçue en 1895 et en 1959, définitivement.

Lors de la bataille de Las Guásimas, aux portes de Camagüey, le contingent qu’apporte Gomez dans le but d'aller vers l’occident est arrêté par une colonne espagnole et ils ont pu obtenir ce que nous pourrions appeler une victoire à la Pyrrhus. Les Espagnols ont pu retourner à Camagüey avec de grandes pertes, les mambises ne pouvaient pas éviter le renfort que les Espagnols reçoivent de cette ville. Les indépendantistes, avec tous leurs blessés, leurs victimes, avec leur épuisement, n’ont seulement pu trouver qu’un refuge dans la montagne.

Comme tous les hommes politiques, Céspedes n'est pas infaillible. Ce n'est pas à moi d’analyser les erreurs car, que puis-je dire quand seulement ceux qui vivent dans la spirale de la bataille ont le droit de dire. Il faut entrer dans l'histoire avec votre tête découverte et respectueusement. Mais chaque histoire a des lumières et des ombres, et ceux qui reçoivent le plus de lumière sont ceux qui projettent les plus grandes ombres. Maintenant, il faut savoir comment étudier ces zones crépusculaires. Il faut d'abord voir la lumière, et la lumière est le feu ; il faut voir d'abord la flamme, être prêt à se brûler, et ne pas regarder hors d'un processus comme celui du 10 octobre, où il n'y a pas d’éclaboussures, ni de sang, ni de boue.

Quand Agramonte meurt, la succession de la Révolution est tuée, et le reste est comme une boule qui descend de la montagne. Céspedes est déposé, et commence immédiatement une succession fragile de la direction de la Révolution, qui n'a rien fait de plus que d’entrer en collision avec la réalité. Et enfin, vient le grand crime, qui est la solitude de San Lorenzo et ce qui se passe là-bas le 27 février 1874, c'est à dire, la mort de Céspedes, au sommet de la montagne.

Avant, sa famille voulait le sauver, elle a ourdi un plan pour aller le chercher. Il hésite. Et, enfin, il accepte son destin, qui était d'accepter la gloire. L'homme du 10 octobre n'aurait pas pu mourir aux États-Unis ou en Jamaïque, où se trouvaient son frère Manuel Hilario et sa sœur Francisca de Borja (Borjita) ; l’homme du 10 octobre ne peut pas oublier son frère Pedro… Quand Pedro de Céspedes est fusillé à Santiago de Cuba, le gouverneur de Oriente, qui était arrivé en novembre 1873 avec l'expédition du Virginius, Céspedes se présente à la Chambre lui disant que maintenant que son frère et son neveu politique Herminio sont morts et qu’il met une fois de plus sa vie au service de la cause de la Révolution.  C'est là où le géant grandit.

Quand nous nous rappelons qu'il se coupe les cheveux et les envoie à ses enfants qui sont nés aux États-Unis ― les jumeaux nés d’Ana de Quesada : Gloria de los Dolores et Carlos Manuel ― ; quand nous savons qu’il envoie le drapeau du 10 octobre dans un petit canot, dans une boîte qu’ils ont préparé pour sauver cet étendard qui est aujourd'hui dans la Salle des Drapeaux, et qu’Ana de Quesada a remis personnellement à Cuba peu après la proclamation de la malheureuse République de 1902, l'histoire s’unie.

Et enfin, le Vieux Président - comme l'appelaient les paysans -, qui parcours la partie de la montagne où il est captif, est laissé à un point appelé San Lorenzo sans plus d'escorte que son propre fils, certains fidèles qui l'accompagnent et quelques voisins de cet endroit.

Maintenant, quelle chose impressionnante : Céspedes est habillé comme il peut, il disait grotesquement, mais rien ne lui manquait. Il écrit à sa femme, qui lui dit qu'elle va lui envoyer des vêtements et il assure qu'il ne veut rien, car il a appris à renoncer à tout. Dans le journal, il confesse qu'un jour, traversant une rivière, il a perdu un éperon en argent qu'il portait depuis le début de la Révolution et a été heureux d'être plus pauvre chaque jour. Tout le passé de sa seigneurie, comme le décrit Martí, avec le diamant sur la bague, la canne d’écaille et d’or, joliment vêtu, ont disparu.  Maintenant, il y a un homme qui, étant encore jeune, chevauche ou marche lors des jours épuisants dans la sierra ; il va religieusement à se baigner dans l'étang de San Lorenzo. C'est impressionnant, parce qu’il est très bien conservé. Celia Sanchez a demandé de préserver cet endroit, elle a ordonné de monter sur la falaise où il grimpait par un petit escalier et là-haut, d'où il s'est effondré, se trouve son buste.

Les biographes, Hortensia et Rafael Acosta, qui est le plus jeune et le plus brillant des cespedianos, éludent le sujet du suicide. Leonidas Raquín, le confident de Céspedes à Santiago de Cuba, a répondu à Ana de Quesada, qui lui demande comment était le corps de son mari quand ils l'ont sorti du ravin et qu’il a été exposé à Santiago de Cuba, et il se réfère à une petite blessure qu'il avait sur la poitrine et à un vêtement brûlé qui, à mon avis, ne correspondait pas à un tir à bout portant de ses persécuteurs.

Il a assuré que toutes les balles de son revolver étaient tous pour les Espagnols, sauf une qu’il réservait pour lui - si au dernier moment il était fait prisonnier, vexé, parce que c'était la Révolution, pas seulement lui, qui allait être enchaîné à Santiago de Cuba, comme quand ils ont pris Pedro Figueredo qui, cependant, au moment de l'exécution, confirme qu'il ira avec Carlos Manuel de Céspedes à la gloire ou à l'échafaud. Alors un acte extrême de sa part n'aurait pas été indigne de son caractère.

Le Père de la Patrie tombe dans un ravin, et il faut le sortir de là. Cette image que Cintio et Fina décrivent du fils quand il arrive, après avoir entendu les coups de feu dans la montagne, et que son père n'est plus là. Alors il suit l'empreinte de son sang et de ses cheveux le long de la hauteur ; il suit la voie qu’il a laissée sur la terre de Cuba ; c’est l'engrais fertile pour une nation qui doit naître, a affirmé José Lezama Lima.

Si l'homme de Yara et de La Demajagua était mort aux États-Unis avec sa famille, il ne serait pas le Père de la Patrie : il serait une anecdote, il serait l'initiateur et rien d'autre. Mais le sacrifice de San Lorenzo, son respect de la loi, son serment que pour sa responsabilité il ne renverserait pas le sang cubain, sa vision d'homme d'État qui atteint l'avenir, le rend ainsi.

Et qu'a-t-il fait à San Lorenzo lors des derniers jours de sa vie ? Il alphabétisait les enfants des paysans durant des heures. Le jour de sa mort, il a ouvert une malle et il a sorti les vêtements élégants qu'il avait conservés et il s’en est vêtu. Tout est écrit dans le journal. Quelques heures avant qu'il ait un rêve prémonitoire dans lequel il se rend compte, comme l’homme hypersensible et intelligent qu’il était, que sa fin est proche. Et cette fin arrive le 27 février 1874, quand il tombe du haut de la falaise, et Manuel Sanguily, que je dois citer, écrit «  il est tombé dans un ravin, comme un soleil de flammes qui coule dans l'abîme ».

Aujourd’hui, combien pouvons-nous continuer à sauver et à inspirer le référence de Céspedes en tant que nation ?

Ici, le seul sauveur est de regarder notre passé, et le passé est tout ce qui se passe en ce moment et qui est déjà derrière nous. Regarder ce passé jusqu'à une date si lointaine, et trouver les fondations du caractère national. Nous ne pouvons pas seulement nous conformer d’une pensée fragmentée, avec des consignes : nous devons chercher l'essence des choses.

De nombreuses analogies et de nombreuses biographies ont été écrites : Leonardo Griñán Peralta, Antonio Aparicio, Herminio Portell Vilá, Hortensia et Fernando dans leur œuvre impondérable de trois volumes ; Cintio Vitier et Fina García Marruz, Lezama a réalisé un texte merveilleux sur Céspedes et je le cite à plusieurs reprises ; Rafael Acosta – je lis actuellement son précieux livre Los silencios quebrados de San Lorenzo, dont j’ai fait le prologue - fait des analyses très profondes et qui sont des références essentielles pour pouvoir l'interpréter aujourd'hui.

Le but est d'observer non seulement l'histoire des individus, mais l'histoire du processus, et comment ce processus et cet exploit ont inspiré la naissance d'un peuple. Et de d’abandonner résolument, comme tentation, d'essayer de les sanctifier, de les idéaliser à tel point que l'exploit devient inimitable par les nouvelles générations. C'étaient des femmes et des hommes comme nous. Ce qui se passe, c'est qu'au moment où le destin les appelle, pour leur propre détermination ou pour les circonstances, ils se sont convertis en hommes exceptionnels. C'est la vérité. Carlos Manuel de Céspedes y López del Castillo, le Père de la Patrie, était exceptionnel.

 


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