Qui est le perdant lorsque l’on détruit les liens culturels ?


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L'orchestre Miguel Failde, applaudi à New York l'année dernière lors du Festival de la culture cubaine aux États-Unis. Photo: Internet

Si dans un premier temps j'ai ressenti un mélange d'indignation et de consternation à la lecture du mémorandum signé cette semaine par le président étasunien Donald Trump, qui restreint drastiquement la participation des organismes fédéraux aux programmes d'échanges éducatifs et culturels avec Cuba et trois autres pays, une deuxième lecture m'a amené à réfléchir à combien le peuple des États-Unis va perdre en étant privé de contacts bénéfiques à la vie spirituelle.

Évidemment, savoir qu'un homme d'État manipule la culture en faveur de ses intérêts hégémoniques ne peut que nous indigner. Trump, nous le savons, ne se distingue pas vraiment pour considérer la culture comme un facteur essentiel du développement social ou même personnel. Lorsqu'on le questionne sur ses lectures, il ne fait pas la moindre allusion ne serait-ce qu’à un roman ou à un poème et, plus d'une fois, il a fait référence à Talent is Overrated: What Really Separates World-Class Performers from Everybody (Le talent est surestimé : ce qui sépare vraiment les leaders de première classe du reste du monde). Tout au plus, il partage quelques citations du Prince, de Machiavel, et de l'Art de la guerre, de Sun Tzu. Mais il ne les a pas lues, il ne fait que répéter des fragments choisis par ses conseillers.

L'idée d'associer l'interdiction des échanges éducatifs et culturels à la traite des êtres humains ne peut pas être plus délirante. Quelle relation peut-il y avoir entre la réduction des fonds fédéraux de promotion des forums universitaires, des expositions d'art et l'organisation de concerts avec le fait que les pays inclus dans le diktat impérial « respectent les normes minimales de la Loi pour l'élimination de la traite des personnes ou qu’ils fassent des efforts importants pour respecter les normes minimales ». C'est la politique du non-sens portée à des dimensions stellaires.

Dans le cas de Cuba, le 5 juin, le Bureau de contrôle des avoirs étrangers (OFAC) du Département étasunien du Trésor, et le Bureau de l'industrie et de la sécurité (BIS) du Département du Commerce, ont annoncé l’annulation des licences générales pour les voyages éducatifs de groupe, de type « de peuple à peuple ».

Tout cela répond à une réalité que la menace ne pourra pas inverser. La colère des éléments anticubains proches de la Maison-Blanche est désormais de notoriété publique face à l’autodétermination du petit archipel voisin, qui a décidé du cours de sa politique étrangère, de sa conduite internationaliste et de sa solidarité, du choix de ses amis, sans céder à la pression ou au chantage de quelque nature que ce soit.

Mais il est triste de constater que ni Trump ni son entourage qui l'incite à faire des proclamations erratiques ne se soucie de la culture des siens. Preuve à l’appui, l’enveloppe budgétaire pour le prochain exercice financier pour le Fonds national pour les arts et le Fonds national pour les humanités (NEA et NEH).

Depuis que Trump s’est installé au Bureau ovale, il s’est chargé de démontrer son rejet de ces institutions, en réduisant les subventions pour leur fonctionnement. En outre, comme il est écrit dans la justification de la Loi de finances pour 2020, « l'administration ne considère pas les activités de la NEA ou de la NEH comme des responsabilités du gouvernement fédéral ». Par ailleurs, il propose la suppression des fonds de l'Institut des services des musées et des bibliothèques.

Richard Ford, un écrivain étasunien à succès et en rien affilié à la pensée de gauche, a défini le profil du président en ces termes : « Avoir Donald Trump comme président, c'est un peu comme laisser tes enfants traîner en mauvaises compagnies (...). Les enfants, soumis à une influence corruptrice, termineront presque certainement par faire quelque chose de vraiment mal, et peut-être irréparable, et finiront sans doute par ruiner leur vie. »


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