La bataille pour la domination des Caraïbes (Fin)


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La bataille pour la domination des Caraïbes

Martí combat constamment les desseins annexionnistes de Washington et les agressions économiques. Le 2 novembre 1889, dans sa correspondance à La Nación, il écrit :

« Le gouvernement de Washington se prépare à déclarer sa possession de la péninsule de San Nicolás et, peut-être, si le ministre Douglas négocie avec succès, son protectorat sur Haïti : Douglas apporte, selon un bruit non démentie, l'ordre de voir comment s’incline le protectorat à Saint-Domingue ».

Martí ne se limitait pas à signaler les problèmes des deux pays, il signalait aussi le remède héroïque :

« Seule une réponse unanime et virile, pour laquelle il y a encore du temps sans risque, peut libérer une fois pour toute les peuples espagnols d'Amérique de l'inquiétude et de la perturbation, mortelles à l’heure de leur développement, causées par la politique séculaire et manifeste de prédominance du voisin puissant, et avec la possible complicité des républiques vénales ou faibles, qui n’a jamais eu l’intention de les développer, auxquels il s'adresse juste pour empêcher leur extension, comme à Panama, ou s’approprier de leur territoire comme au Mexique, au Nicaragua, à Saint-Domingue, à Haïti et à Cuba, ou pour rompre un traité, par l'intimidation, avec le reste de l'univers, comme en Colombie, ou pour les obliger, comme maintenant, à acheter ce qui ne peut pas être vendu et se confédérer pour leur domination ».

Pour sauver notre Amérique du danger yanqui, et constituer avec Cuba et Porto Rico libres, le noyau initial de la décolonisation antillaise, et faire obstacle aux menaces du colosse du Nord, Martí va à Saint-Domingue, pour se réunir avec Máximo Gómez, car le vieux général mambí, ainsi qu’Antonio Maceo, partageraient avec lui la direction d'une nouvelle croisade pour la liberté et la démocratie populaire antillaise qui devait bientôt commencer en terre cubaine.

L'intervention américaine dans la guerre d'indépendance de Cuba a été le pas décisif qui a ouvert la marche de l'impérialisme comme colonisateur des Caraïbes et, à Cuba, avec le fameux Amendement Platt, il a imposé de telles restrictions, des garanties si strictes, qu'il a établi un protectorat virtuel dans l'île.

Un protocole entre les gouvernements de la République Dominicaine et des Etats-Unis est signé le 4 février 1905, par lequel les Etats-Unis assumaient l'administration financière, amplifié par un autre du 8 juillet 1907. Suite aux recherches d'auteurs nord-américains et dominicains publiées dans les années 30, nous présentons ce résumé de la tragédie des Caraïbes.

Le contrôle financier yanqui de Santo Domingo a été rapidement suivi par l'interférence dans sa vie politique. Le président dominicain a été assassiné en 1911 et un gouvernement provisoire a été établi. Le président Taft a envoyé deux commissaires spéciaux à la fin de l'année suivante pour qu'ils réalisent des recherches sur la situation…

Le résultat de cette interférence des Etats-Unis a seulement donné des nouvelles révolutions (…) L'interférence financière et politique des Etats-Unis à Santo Domingo a finalement conduit à une intervention armée. En avril 1916 une autre insurrection dans ce pays a eu lieu et, cette fois, le 4 mai 1916, les « marins » yanquis ont débarqué.

Le président Jiménez a démissionné et le Congrès dominicain a provisoirement nommé le docteur Henríquez y Carvajal. Le Département d'État a refusé de reconnaître cette élection légale, à moins que le président signe un traité avec les Etats-Unis, exigé depuis 1915… Le président Henríquez a refusé la reconnaissance que lui accordait le Département d'État en de tels termes, et, par conséquent, le 17 octobre, en obéissant aux instructions de Washington, le collecteur des douanes yanqui a refusé de payer les impôts qui lui correspondaient au gouvernement légitimement élu de Santo Domingo. 

Un calme intérieur absolu a suivi. Tout le pays s’est regroupé autour du président : les différences politiques ont été oubliées et les employés publics ont réalisés leurs devoirs sans rétributions, jusqu'au moment où il leur a été possible de le faire du au fait que les autorités yanquis refusaient de payer leurs salaires jusqu'à ce que le traité soit signé. La résistance aux exigences yanquis, bien que passive, a été générale. Le calme a été brisé avec la présence des fusils yanquis. Le capitaine H.S. Knapp, à la tête des « marins », a déclaré la loi martiale le 29 novembre 1916. Il a destitué les autorités dominicaines, il a dissous la Législature Nationale, il a interdit les élections et il s’est proclamé « législateur suprême, juge suprême et exécuteur suprême ». Il a établi un régime de force militaire et d'impôts et il a augmenté la dette publique. Cette dictature a été établie selon la proclamation officielle de la loi martiale, selon les instructions de Washington, car le gouvernement des Etats-Unis avait exigé certaines mesures nécessaires de Santo Domingo que son gouvernement n'a pas voulues ou n'a pas pu adopter… La dictature militaire a duré jusqu'en 1924.

La National City Bank a commencé l'intervention yanqui à Haïti. Le Département d'État a fait les pas nécessaires pour assurer l'investissement des banquiers. Plusieurs fois, durant 1914 et 1915, le Département d'État a insinué directement à Haïti la convenance d'obtenir le contrôle des douanes, en prétextant les troubles politiques internes. Il a profité d'une révolution initiée dans la province du nord pour proposer un appui au président, si celui-ci signe une convention qui donnerait les douanes au contrôle yanqui. Le président a refusé de compromettre l'indépendance de Haïti et il a démissionné. Le 10 décembre, le Département d’État a formellement réitéré une telle proposition au nouveau président, par l’intermédiaire de l’Ambassadeur yanqui à Haïti et, de nouveau, la proposition a été rejetée.

À la fin, les forces yanquis de l'amiral Caperton ont débarqué et elles se sont appropriées du pays. Un an plus tard, suite aux suggestions de la National City Bank et une décision du président des Etats-Unis Woodrow Wilson, le gouvernement haïtien a dû désigner un nord-américain comme son conseiller financier. Ce conseiller, nominalement un fonctionnaire haïtien, a complété la conquête d’Haïti par la National City Bank.

En 1921, une importante protestation réalisée par des notables Haïtiens au Comité de Recherche du Sénat des Etats-Unis sur l'occupation d’Haïti, a déclaré que l'occupation militaire yanqui « est le régime le plus indigne de l'autocratie militaire qui n’a jamais été mené à bien au nom de la démocratie américaine ».

De fait, pendant la Première Guerre Mondiale, toutes les grands Antilles sont restées au pouvoir de l'impérialisme nord-américain.

Les Nord-américains, avec le protectorat de Cuba et la base navale de Guantánamo, contrôlaient la route entre Cuba et Haïti et, grâce à la guerre européenne, ils se sont assurés la domination financière, commercial et politique de Cuba, d’Haïti et de Santo Domingo.

Pour compléter le tableau, avec Porto Rico en leur pouvoir, ils ont acquis les trois îles, Saint-Thomas, Sainte-Croix et Saint-John, en 1917, qui convertissaient pratiquement la Méditerranée d’Amérique en lac nord-américain.

Une position dominante qui a été amplifiée par l'appelé « Acte de La Havane », à savoir, les accords de la Réunion de Chanceliers d'Amérique, du 30 juillet 1940, qui légalisait virtuellement l'expansion impérialiste nord-américaine dans la région des Caraïbes.

Publié dans la revue Anales del Caribe de la Casa de las Américas


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